Des masques transparents pour les personnes sourdes et malentendantes ?

Avec un masque ordinaire « fermé », les personnes sourdes et malentendantes ne savent plus lire sur les lèvres ni voir les expressions du visage de la personne avec qui elles communiquent en langue des signes.

Cela ajoute, pour ces personnes, une difficulté supplémentaire à une communication déjà rendue difficile du fait de la surdité. En milieu de soin cela risque de provoquer des problèmes à l’étape du diagnostic ou lors des soins ou, si les masques et autres moyens de protection sont abandonnés, d’entrainer un risque accru de contamination.

Alors, faut-il utiliser des masques transparents ? La Fédération Francophone des Sourds de Belgique affirme que c’est une bonne idée, cependant, elle invite aussi à la prudence et donne quelques astuces pour se protéger autrement.

Avec une personne sourde, la communication se fait soit en langue des signes, soit oralement, soit par écrit.

En langue des signes, si ce sont surtout les mains qui bougent que l’on remarque, les expressions du visage ont aussi du sens et donnent de l’information. Voir une personne signer sans voir ses expressions, c’est comme entendre une phrase à laquelle il manque des lettres, des mots ou des syllabes.

Communiquer oralement, pour une personne sourde ou malentendante, c’est aussi et surtout lire sur les lèvres. Sans la lecture sur les lèvres, la compréhension orale devient très difficile, si pas impossible. Un masque « fermé » prive donc ces personnes d’un support visuel extrêmement précieux.

Passer par l’écrit peut être une solution mais beaucoup de personnes sourdes ne sont pas à l’aise avec le français. Toutefois, une autre partie peut lire et écrire. L’écrit peut être une solution au problème des masques « fermés » mais avec ses limites.

Pas encore de masques chirurgicaux transparents en Belgique

Hélas, il n’existe pas encore, en Belgique, de masque transparent qui répond aux normes de protection d’un masque chirurgical, et encore moins d’un masque FFP2.

Concevoir un tel masque, pour qu’il réponde aux normes, est un défi technique. Le masque doit comporter une ouverture transparente qui permet de lire sur les lèvres, être assez étanche pour éviter la projection de gouttelettes et doit être muni d’un dispositif anti-buée. Il doit aussi éviter la rétention d’eau pour éviter que la personne ne se touche le visage en étant gênée.

Aux Etats-Unis, une société est parvenue à développer un masque chirurgical répondant à la norme ASMT Level 1 : https://safenclear.com/  Celui-ci a été développé pour la communication avec des personnes sourdes et malentendantes et est également utilisé auprès de jeunes enfants ou d’autres patients ayant besoin d’être rassurés sur les intentions du personnel soignant ou des autres personnes.

Idéalement, toute personne étant susceptible d’entrer en contact avec une personne sourde devrait pouvoir disposer d’un masque transparent aux normes attendues.

Ainsi, même si, actuellement, des solutions sont en cours de bricolage, nous souhaitons que les entreprises belges qui fabriquent des masques développent également des masques transparents chirurgicaux surtout, et, au mieux, également de type FFP2, et qui soient aux normes, tant pour le court que le long terme. En effet, chaque hôpital ou milieu médicalisé devrait disposer d’une réserve suffisante de ce type de masques pour l’accueil de patients sourds et malentendants, ainsi que pour rassurer le public le plus fragilisé (personnes angoissées de ne pas voir le visage du soignant par exemple). Les milieux d’accueil du public sourd et malentendant comme les crèches, les écoles, les résidences pour personnes âgées ou avec handicaps associés, les associations, les services d’accompagnement et sociaux, ou encore les administrations et entreprises qui travaillent avec ces personnes, ont besoin de ce type de masques.

Aujourd’hui, ce qu’il faut faire dépend de la situation.

A priori, pas de contamination au COVID-19 :
les masques cousus « maison » et les visières transparentes.

 Dans ce contexte de pénurie mondiale de masque, les masques cousus maison sont parfois la seule possibilité de s’en procurer. On peut envisager d’en fabriquer des transparents s’ils servent seulement à prévenir, « faute de mieux », la contamination d’une personne à l’autre, dans la vie quotidienne, en déplacement, en faisant ses courses, en situation où la distanciation sociale ne peut pas être respectée ou en complément de celle-ci.

Nous recherchons activement un bon tutoriel sur lesquels les personnes qui souhaitent en fabriquer puissent se baser.

En voici déjà un exemple :  Une étudiante fabrique des masques pour sourds et malentendants 

Toutefois, il faut faire attention à :

  • Privilégier des matériaux qui peuvent être stérilisés.
  • Se toucher le visage le moins possible en cas de rétention d’humidité.

On peut également, dans certains cas, adopter une visière transparente plutôt qu’un masque. Elle serait alors suffisante et n’obligerait pas à porter en dessous un masque en tissu.

A Liège, Procutlaser, une société spécialisée dans le découpage du plexiglas vient de commencer une production de visières (taille enfants et adultes) et d’écrans de protection.

Contamination au COVID-19 suspectée ou certaine :
les masques chirurgicaux et les masques FFP2.

 
A chaque fois qu’il y a des chances très élevées de contamination : à la maison quand une personne est atteinte, en maison de repos ou de résidence où il y a des personnes sourdes ou malentendantes, ou encore à l’hôpital, il ne faut pas recourir à des masques « faits maison » transparents car ils sont très probablement trop éloignés des normes de protection jugées satisfaisantes. Il faut adopter des masques fermés les mieux conçus que possible.

Cependant, voici quelques astuces pour pouvoir quand même communiquer avec une personne sourde ou malentendante, à utiliser en tenant toujours compte de la situation et du type de communication (langue des signes, oral ou écrit) :

    • Mettre un masque fermé et quand même et signer de la façon la plus claire que possible en exagérant les expressions du visage pour qu’elles se voient mieux au niveau des yeux.
    • Mimer et inviter la personne à imiter une action. Les kinésithérapeutes, par exemple, peuvent montrer le mouvement à faire.
    • Communiquer au travers d’une vitre ou d’un plexiglas. Si une longue explication doit être donnée et interprétée en langue des signes (cas d’un patient sourd contaminé par exemple), on peut envisager de déplacer temporairement ou de façon permanente la personne contaminée auprès de l’écran qui sert de « rempart ».
    • Si on le peut, utiliser un smartphone et un logiciel de reconnaissance vocale qui va transcrire ce qui est dit. Il en existe plusieurs et il faut les tester car aucun ne fonctionne de façon tout à fait optimale. Attention toutefois à la contamination croisée et chacun doit idéalement avoir le sien.
    • Munir chacun d’un bloc de feuilles et d’un bic et communiquer par écrit en se montrant ce qu’on a écrit.
    • Recourir à l’interprétation langue des signes de Belgique francophone – français à distance, par le biais de Relais-Signes www.relais-signes.be dans certaines situations.

Voir aussi :

VIDÉO. «Le port du masque est angoissant» : la crise du Covid-19 bouleverse le quotidien des personnes sourdes

Covid-19: pas facile quand on est sourd !

Crédit image masques transparents: Ashley Lawrence